Les vergers dans la vallée de la Dordogne de Lalinde à Port-Sainte-Foy
Mémoire de maîtrise de géographie sous la direction de René Pijassou, Bordeaux III, 1972
Et les fruits passeront la promesse des fleurs (Malherbe)
L’extension des vergers en Dordogne a été souvent regardée comme le signe avant annonciateur d’une ère nouvelle pour certains agriculteurs. Grâce à cette culture ils allaient, animés d’un esprit nouveau, entrer de plain-pied dans l’économie nouvelle, en se tournant résolument vers le monde extérieur.
La vallée de la Dordogne est considérée comme l’une des régions les plus riches du département, surtout dans sa partie bergeracoise. c’est là, en aval de Lalinde jusqu’à Port-Sainte-Foy que s’offrent à la vue les vergers qui participent à cette richesse.
L’étude des sols, du climat, nous explique dans quelle mesure la nature est favorable à cette culture. l’évolution de la conjoncture agricole nous apprend comment les agriculteurs, ne pouvant plus vivre du produit des cultures traditionnelles, chechèrent une voie nouvelle vers un avenir meilleur et se firent arboriculteurs. Cette culture délicate demande beaucoup de soins tout au long de l’année mais aussi les efforts sont souvent récompensés comme nous le montrent les exemples de vergers choisis.
On peut se demander en conclusion, à la lumière des développements économiques les plus récents, quel est l’avenir réservé aux vergers de la vallée.
L’année 1970 va-t-elle faire date dans l’histoire de l’arboriculture fruitière de la vallée ?
Jusque là, malgré et à cause des catastrophes climatiques, les méthodes de culture se sont peu à peu perfectionnées et modernisées en tirant les leçons des expérience malheureuses. Les sols riches sont partout bien drainés et bien irrigués. Les moyens de lutte se sont multipliés. Il semble que les meilleures techniques de production n’ayant plus de secrets, seul subsiste un problème de commercialisation. l’abondance généralisée des fruits crée un encombrement du marché entraînant une baisse des prix de vente et, par là, une réduction notable des bénéfices, ainsi qu’une recherche de plus en plus vitale de nouveaux débouchés ( de plus en plus rares étant donné les concurrences françaises et étrangères). À qui vendre des tonnes de pommes ?
Pour les pêches, à ces difficultés s’en ajoutent d’autres. Nous avons déjà remarqué que le Bergeracois était traditionnellement considéré comme une limite septentrionale de cette culture craignant le froid. Or, le 16 février , après un réchauffement précoce ayant accéléré la végétation, la température descendit en une nuit à -7° , surprenant les arboriculteurs dont la plupart des vergers fut détruite à 90 %. ce chiffre parle de lui-même. Nous entendîmes certains propriétaires dire que cette culture étant décidément loin d’être rentable et qu’ils feraient mieux d’arracher tous les arbres.
Les économistes auront beau déclarer que « l’agriculture ne sauraient conserver un caractaire aléatoire, les caprices du climat viendront toujours empêcher qu’elle ne soit jamais une « industrie » comme une autre.
L’opinion émise par les arboriculteurs au début de l’été 1970 nous permet de définir trois tendances principales, mise à part la pruniculture qui, moyennant quelques précautions, peut envisager l’avenir avec confiance.
Tout d’abord, M. Coste, à la tête de la coopérative de Valcodor, veut entraîner le reconversion d’une partie du verger en fraisières et publiait, dans le journal Sud-Ouest du 8 juillet, l’aticle suivant : « Aux producteurs de fraises. Le succès de la campagne qui s’achève confirme la qualité gustative et la haute tenue des fraises de Dordogne. De toutes parts, nous recevons des éloges et en sommes très satisfaits. Il y a lieu de créer un label et porter nos fruits sur de nouveaux marchés à conquérir. Mais pour réussir, l’action conjuguée de tous est nécessaire ».
D’autres arboriculteurs pensent que la culture des pêches est à proscrire étant donné sa non-compétitivité avec les régions méridionales plus ensoleillées, mais que la culture du poirier, noyer et châtaignier peut être envisagée favorablement. Cependant ils restent fidèles aux pommiers, considérant que le micro-climat particulièrement favorable donne aux fruits une qualité exceptionnelle qui leur permettra de vaincre les difficultés de commercialisation.
Enfin, certains, comme M. Herman, envisagent malgré tout la plantation de pêchers.
Seuls des unités ou des groupements de petite arboriculteurs disposant de matériels, de capitaux et de stations de conditionnement suffisants pour abaisser au maximum les prix de revient, tout en produisant des fruits d’excellente qualité, pourront assurer la prospérité des vergers de la vallée de la Dordogne.
1969-1970